Kinshasa à l'épreuve de la désagrégation nationale
lundi 21 avril 2008, 17:30 Freddy Mulongo Lien permanent
Sébastien Tshingi KUENO NDOMBASI parle de tout sur kinshasa: la politique et l'ethnisation du pouvoir, l'économie de la débrouille, le lingala comme langue nationale et idéologique, l'exode rural, de la corruption, les Eglises au service du régime, des agents du désordre, du règne et de l'anarchie des petits transporteurs privés, de la misère des kinois comme catalyseur de la mort...
Les réalités sociales ne se sont traduites que par les biais des ethnies. A Kinshasa, les leaders politiques orginaires du bas Congo et du Kwango-Kwilu ont fait appel aux ressortissants de leurs provinces d'origine pour gongler leur électorat aux élections municipales et législatives. Ils ont occupé anarchiquement des terrains dans la ville, au détriment de ses autochtones. Pierre Mombele, président général de l'Union des Bateke-Bahumbu (l'UNIBAT), réclama des terres pour ériger des véritables entités Bateke-Bahumbu dans la capitale mais cela lui fut refusé. Ces derniers ont alors décidé d'occuper par force le quartier situé au- délà du quartier Kimbangu et de la rivière Kalamu, le "Camp Mombele". Les teke et les Humbus sont devenus au fil des années minoritaires dans leur propre territoire dont ils partagent la légimité avec les populations de l'ancienne province de Léopoldville.: un héritage de la géographie coloniale.
La prise de conscience de la population Kinoise sur sa misère prime sur l'ethnocentrisme, ce qui sauva Kinshasa d'une guerre civile comme celle de Brazzaville en 1997. Ceci explique aussi en partie la popularité de Tshisekedi: il n'ya plus de repère ou de recours ethniques face à cette "nomenklatura" constitués des ressortissants de toutes les provinces. Dans la lutte quotidienne des kinois pour la survie, les frères du village n'ont apporté aucune solution. Kinshasa a subi la domination d'une nouvelle classe locale de " colonisateurs" vivant dans le luxe et dans l'opulence. Des individus, toutes ethnies confondues, ont collaboré avec le régime dictatorial pour leur intérêt propre, sans penser au développement de leurs " frères" ou de leur "pays". Les pillages à Kinshasa et à l'intérieur du pays n'ont pas visé seulement les biens des étrangers, mais aussi ceux des fils du coin. Tous les Zaïrois qui se sont réfugiés à l'étranger à l'arrivée de M'zée Laurent Désiré Kabila ne sont pas tous originaires de l'Equateur. Et l'accueil résérvé aux troupes de l'AFDL par la population toutes ethnies confondues, était en partie dà» à ce facteur
L'initiation à la démocratie-mieux au pluralisme politique-débutée en 1957 avec les élections communales, puis les législatives de 1960 et de 1965, a été interrompue après les cinq premières années de l'indépendance -30 juin 1960-24 novembre 1965-sans que les citoyens aient appris à choisir leurs représentants librement et au suffrage universel. Du paternalisme colonial le pays est passé progressivement à "l'infantilisation" par l'Etat postcolonial et où le "père de la nation" gérait et dirigeait selon sa volonté et ses humeurs.
Tous les droits du citoyen ont été convertis, grà¢ce à sa magnanimité, en dons du Président Fondateur. Un système symbolisé par la phrase "Tata aya nzala esili". Le Père de la nation satisfaisait selon sa volonté les besoins de ses enfants. Les plus grands et les plus forts se sont mieux servis que les autres, laissant les plus petits et les nourrissons sans voix ni force croupir dans la misère ou mourir de malnutrition, de sous alimentation et d'autres maladies disparues ou inconnues ailleurs.
Le Dictionnaire Hachette Encyclopédique Multimédia de l'année 2000 n'a retenu que les noms de Cyril Adoula, Laurent Désiré Kabila, Joseph Kasa Vubu, Emery Lumumba, Mobutu Sese Seko et Moïse Tshombé en tant que hommes politiques congolais. Faut-il continuer à gesticuler, à crier à tout va qu'on est "légitime" comme le font les autorités Congolaises actuelles pour espérer entrer dans l'histoire par la grande porte? Quatre décennie après l'indépendance de la République Démocratique du Congo, il est triste de remarquer des acteurs politiques sont compté sur les bouts des doigts.
Historien véridique et sans complaisance, Sébastien Tshingi KUENO NDOMBASI bat en brèche le disque enrayé redondant que l'on nous a abreuvé durant les élections 2006 de Louis Michel en République Démocratique du Congo: "les premières élections libres, démocratiques". En 1957, il y a eu des élections communales; en 1960 et 1965, les élections législatives ont bel et bien eu au pays de Lumumba.
Il est plus qu' urgent pour les historiens Congolais d'écrire l'histoire de notre pays. L'exemple de Sébastien Tshingi KUENO NDOMBASI, qui avait écrit sa mémoire de licence sur " fixation et extension des groupes tribaux dans l'évolution de Kinshasa" département d'histoire à l'IPN en 1975, est encourageant.